22/08/2009

Bal costumé - Melhyrïa

COCKROACH, INC.

Où tout finit bien dans le meilleur des mondes…



  • Louis, mon ami, une idée splendide me vient !

Louis, nonchalamment (mais toujours de façon sexy, du moins le croyait-il) étalé sur le lit de son grand ami Marius, leva un sourcil indolent :

  • Je ne peux contenir la hâte que vos paroles me procurent, cher ami. Faites-moi donc part de cette idée splendide !

Marius bomba le torse (enfin, encore plus qu’il ne l’était déjà) et annonça :

  • Un bal costumé. Je vais faire organiser par la fac un bal costumé auquel tous les étudiants devront venir. Et là, sous couvert des masques, mon Ziprian tombera enfin sous mon charme dévastateur.

  • Oh ! Car en plus d’être costumé, le bal sera masqué ?

Un sourire que l’on ne pouvait qualifier que de machiavélique illumina le visage de Louis Luterne et, avec un geste étudié, il replaça derrière son oreille droite une mèche de ses cheveux. Une fois en collants, tunique de soie et escarpins à boucle (sans oublier une cape pour les effets de tissu dans la brise), le monde ne lui résisterait plus et il serait enfin adulé à sa juste valeur. Marius de son côté songeait plutôt à son fameux déhanché dévastateur : qui dit bal dit danse… Ah, que ne ferait-il pas pour un tango langoureux avec son Ziprian…

  • Mais, reprit Louis les sourcils froncés, cher ami, comment diable allez-vous convaincre votre noble établissement à orchestrer un tel événement ?

Marius se rengorgea, un petit rictus condescendant aux lèvres. Sans nul doute que son regard, sous ses lunettes noires, était lui aussi un peu hautain.

  • Quelques professeurs me doivent des faveurs…

Et il quitta la pièce d’un pas censément martial, mais que le dandinement exagéré de son arrière-train rendait plutôt ridicule. Louis ne s’offusqua pas de ce départ soudain et décida d’aller rendre visite à certain tailleur de sa connaissance.


***

L’affiche, sobrement pailletée et traversée d’un arc-en-ciel, proclamait :





Églantine la première avait découvert l’affiche et Ziprian et Ovide avaient mis un certain temps à découvrir que son histoire de valse moyenâgeuse n’était pas une autre de ses élucubrations mystico-hippies. Ovide c’était immédiatement résolu à avoir une sale note sur ses prochains devoirs, avant de réaliser, calculs à l’appui, que le dossier à rendre le lundi d’après concernait la physique et que, vu ses derniers résultats dans cette matière, il ne pouvait décemment pas se permettre de perdre plus de points encore sur sa moyenne trimestrielle. Déprimé, il s’enferma dans sa chambre et se lança à la conquête du level up de son personnage préféré de WOW.

Ziprian, bien qu’il trouva l’idée séduisante, ne pouvait que regretter l’absence de son cher et tendre Neil à un moment si opportun. La mort dans l’âme il se prépara à rechercher un costume qui répondait au critère « médiéval » sans pour autant le faire ressembler à un paysan dénutri (voire carrément déjà mort vu son teint pâle). Mais avant cela, il devait convaincre Ovide de l’accompagner. Après s’être torturé les méninges, une idée parfaite lui vint à l’esprit.

***


  • Bonjour, Janice. Comment allez-vous ?

  • Ah Ziprian ! Tu tombes bien, je pense qu’il n’y a que toi qui puisses faire sortir mon fils de son antre. Deux jours qu’il y est, je crois qu’il est grand temps pour lui d’avaler un vrai repas.

Mi-sardonique, mi-désolée, la mère d’Ovide laissa entrer le meilleur ami de son rejeton (et presque le seul à ne pas être virtuel). Ce dernier gravit les marches conduisant à l’étage et frappa délicatement à la première porte à gauche. Un grognement digne d’un ours dérangé dans son hibernation lui répondit.

  • Ovide ? J’ai eu une idée pour le bal costumé.

Le grognement qui lui revint cette fois-ci ressemblait à s’y méprendre aux lamentations d’un Chewbacca qui se réveillerait intégralement chauve. Décidant de couper court à ce concert désolant, Ziprian balança ingénument :

  • Tu sais, le thème « médiéval » je le trouve pas si mal… Y’avait des chevaliers au Moyen-Âge.

Court silence. La porte s’ouvrit légèrement et deux yeux brillants d’espoir sous une paire de lunettes surmontée d’une tignasse hirsute apparurent dans l’entrebâillement.

  • Avec une armure, le chevalier ?

  • Et une épée aussi, acquiesça le blond.

Un sourire immense bouffa le visage du brun. Le Samedi à venir ne s’annonçait pas si horrible…


***

Dans sa tenue de templier bien trop large pour révéler la grâce et l’harmonie de ses membres déliés, Louis Luterne ne s’amusait pas du tout. Pour la troisième fois déjà il tenta de poser la question cruciale qui le torturait à Marius :

  • Daigneriez-vous cher ami accéder à mon humble requête et m’instruire de la raison pour laquelle le thème de ce bal costumé est le Moyen-Âge ?

Mais ce dernier, bien trop occupé à rajuster la capuche de sa bure monacale qui cachait son visage, tout en observant la salle à la recherche de celui qui enflammait son cœur, n’écoutait pas un mot de ce qu’on lui disait et répondit distraitement que oui, la tenue de templier était très bien, que l’épée en plastique ne faisait qu’un tout petit peu toc et que le loup en soie ne déparait pas du tout avec le reste. Abandonnant une cause qui lui semblait définitivement perdue, Louis Luterne attrapa un gobelet de ce qu’il pensait être une limonade, l’avala cul-sec et ne comprit jamais comment il avait pu finir dans le lit d’une étudiante laide et anorexique beaucoup plus jeune que lui. S’il avait su que ce gobelet (et les nombreux suivants avalés dans la foulée) contenait en fait du rhum vieux pur, subrepticement infiltré par quelques étudiants fêtards et contestataires, peut-être aurait-il mieux compris. Qui se serait douté en effet qu’un gars que l’on voyait toujours un verre de rosé ou un cocktail à la main tenait si peu l’alcool ?

De son côté, Marius venait enfin de repérer l’élu de son cœur, sa tendre moitié, son petit sucre d’orge, bref, Ziprian. Bien sûr, il était sublime dans une tenue très sobre : chemise blanche à lacet, manches bouffantes et poignets serrés, pantalon noir, guêtres en cuir, cape en velours bordeaux ainsi que, accessoires ultimes, le ceinturon clouté et le loup de satin noir, très à propos sur lui. Passant immédiatement en mode dragueur, Marius s’approcha du jeune homme au teint d’albâtre. À peine avait-il ouvert la bouche que Ziprian, l’air terrorisé, gargouillait :

  • Ovide !

Une ombre immense s’abattit soudain sur Marius, qui se recroquevilla. Le costume de paladin d’Ovide, armure étincelante et véritable épée à deux mains, était très convaincant. Sous son casque, la voix amusée du brun retentit :

  • Des lunettes de soleil sous un capuchon… Et une mèche de cheveux mi-lisse mi-bouclée… Serait-ce notre très cher Marius ?

Ziprian opina furieusement de la tête et, d’un petit coup d’épaule désinvolte, Ovide envoya bouler le gêneur un peu plus loin. En voulant se relever, le moine improvisé bouscula un fantassin peu commode qui l’expédia à l’hôpital avec une côte fracturée, un bras cassé, un œil au beurre noir et, pour faire bonne mesure, une authentique tonsure.

Ziprian poussa un soupir de soulagement, la larmichette à l’œil :

  • Ovide, t’es un vrai poteuuuh.

Celui-ci haussa les épaules, modeste :

  • Tu sais même pas à quel point.

Puis il se décala d’un pas un peu lourd, dévoilant aux yeux ravis de Ziprian un Neil tout fraîchement débarqué d’Écosse et absolument craquant dans son costume de troubadour, cornemuse sous le bras.

  • Neiiiiil !

  • Zipwian ! Je ai Erasmus a little bit plus long !

Les deux tourtereaux se prirent dans les bras, émus, et Ovide, qui n’en pouvait plus de tant de mièvrerie, détourna pudiquement le regard et observa la foule. Il venait de reconnaître Joy (momentanément transformée en paysanne à bonnet) en grande conversation avec Églantine (facile à repérer en fou du roi : chapeau à clochettes et chaussons pointus) lorsque un éclat orangé attira son attention ; le fantassin qui avait bastonné Marius un peu plus tôt dans la soirée s’avérait être une superbe rousse, qui maintenant qu’Ovide la voyait de plus près s’avéra être fort généreusement dotées en courbes par la nature. Ovide plissa les yeux (sans lunettes sous son heaume, il ne voyait pas grand-chose) et comme elle se rapprochait encore, constata que le vert intense de son regard transperçait aisément la barrière de son masque. Il en était à compter les taches de son qui paraient harmonieusement la peau sans aucun doute très douce de ses bras lorsqu’il comprit enfin qu’elle se dirigeait vers lui, et même qu’elle l’avait atteint.

  • Salut ! Je voulais te remercier de m’avoir laissé m’occuper de ce type tout à l’heure. C’était peut-être ta chasse gardée, désolée.

Pris de court, Ovide la fixa avec un air stupide qui, heureusement pour lui, passa inaperçu sous le casque. Il parvint enfin à grommeler un petit « de rien » puis, n’écoutant que son courage, un « tout le plaisir était pour moi ».

À son tour intimidée, la fantassin baissa les yeux :

  • Je suis pas très douée pour les conversations irl, mais si tu veux bien on pourrait euh… prendre une bière ensemble ?

  • Irl ? Tu es une gameuse ?

La rousse baissa les yeux, gênée.

  • Pire, une geek.

Melhyrïa pour Kima

16 août 2009











Melhyrïa pour "Bal costumé"

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1 commentaire:

Senjak a dit…

Enfin c'est au tour d'Ovide d'être chanceux, cool !
Et Louis et Marius sont toujours aussi impayables.
Je me permet par contre de te dire que j'ai tiqué sur le "Un sourire immense bouffa le visage du brun."
Parce que, soit Ovide vient de se faire bouffer le visage par un Joker devenu cannibale, soit il a le visage tout bouffi à cause de son sourire, peut être parce qu'il y est allergique. J'avoue avoir trouvé à chacune des explications un potentiel comique assez intense ;-).
Mis à part cette très légère maladresse, somme toute plaisante, j'ai trouvé ton texte tout à fait plaisant à lire.